jeudi 11 juin 2015

Pilsen, entre latinos et bobos


Chère Zandra,

Tu m'as fait habiter dans un quartier que le chauffeur de taxi ne connaissait pas. Forcément, il venait d’Éthiopie. Il n'arrêtait pas de me répéter jamais été, jamais entendu, ce qui ne me rassurait pas trop. Je disais Pilsen, je m'efforçais d'y mettre un gros accent américain, rien n'y faisait. Grâce à une application sur son téléphone, il a trouvé. Pilsen existe... Tout le monde à Chicago connaît Pilsen, m'as-tu affirmé à mon arrivée.
On ne sera pas extrêmement surpris de savoir que Pilsen a été fondé par une bande d'immigrants irlandais et allemands venus travailler dans le coin. Puis des Tchèques sont arrivés vers la fin du 19e siècle, ils ont nommé leur nouveau lieu de résidence en souvenir de la ville de Bohème.
Thalia Hall, comme un goût de Bohème
Dans les années 60, de nombreux Mexicains ont dû quitter leur quartier pour cause de construction de l'Université d'Illinois à Chicago. C'est à Pilsen qu'ils sont venus s'installer. Bien qu'ils aient hérité alors d'un quartier en plein déclin économique, ils ont construit des institutions culturelles dignes des quartiers voisins plus riches, notamment le Musée national de l'art mexicain (que je n'aurai vraisemblablement pas le temps de visiter).

Il semble que des craintes d'embourgeoisement planent sur le quartier depuis quelques années quand une compagnie a commencé à convertir d'anciens entrepôts en studios pour artistes. Tu me dis que tu aimes cet environnement de petits restaurants, de galeries, qu'il t'apporte une énergie positive.
Certains regrettent que les Mexicains soient encore une fois obligés de partir ailleurs. Et pas seulement à cause des artistes. D'après ce que j'ai compris en écoutant les discussions que tu avais avec tes amis, en posant des questions aussi, on recherche de moins en moins à vivre en banlieue, c'est loin, il ne se passe rien et on perd des heures dans les embouteillages. A vélo dans Chicago, on dépasse les autos... Donc, on recherche à se loger près du centre. On achète, on retape pour transformer des vieilles bicoques en petites merveilles... qui ne sont pas à la portée de toutes les bourses.
Ta splendide maison (en gris) dans une des
rues les plus courtes de Chicago. C'est vrai
qu'elle ne porte que le No 2031.
Je suis heureuse que le chauffeur de taxi ait trouvé ton adresse. Ta rue, les rues avoisinantes me deviennent familières. Je crois bien que je m'y plairait aussi. Mais je voudrais que les latinos restent, j'aime ce côté exotique.
Avec toute ma reconnaissance que tu partages généreusement une tranche de ta vie avec moi.
D.

PS. Encore une différence entre nous : je garde mon amitié pour une relation sur la durée, mais le cœur y est ! Vas-tu encore me trouver hilarious?

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